Les structures-fantômes
Les structures-fantômes
Les structures sont semblables à des êtres vivants : elles naissent, croissent, se développent, se dotent de caractéristiques spécifiques, qu’il s’agisse d’une compréhension particulière de l’objet du groupe, de l’idéal sous-tendu par lui, ou d’un mode de fonctionnement (hiérarchie plus ou moins stricte, promotion ou dépréciation de l’initiative). Et, en définitive, ces structures meurent, que ce soit en se cachant comme un chat à l’agonie, soit dévorées par plus forts.
La mort de la structure peut être évitée par son adaptation, c’est-à-dire par la modification de ses caractéristiques dans le but d’améliorer sa résilience au milieu et à ses évolutions. De la même manière, les individus d’un groupe animal qui développeraient une meilleure tolérance au froid auraient logiquement plus de chances de survivre lors d’une baisse tendancielle de la température. C’est ce que nous appellerons par anthropomorphisme « la réforme » de la structure, par opposition à la révolution qui induirait un changement total de paradigme et l’utilisation de la violence, ce qui, au sein d’une structure donné, n’est pas souhaitable. La violence entraîne un défaut durable de légitimité qui parasite la structure ; la création d’une structure nouvelle lui est presque toujours préférable.
Comme une grenouille a peu de chances de se doter d’ailes si les modifications du milieu n’en font pas la seule opportunité de survie de l’espèce (fût-ce la seule opportunité, une telle mutation devrait procéder d’une sélection génétique féroce dont le succès serait quasi-miraculeuse), une structure donnée a peu de chances d’évoluer dans une direction très différente de celle à laquelle répond son existence-même, et des caractéristiques dont elle s’est initialement dotée. Ainsi, il est peu probable qu’une association qui lutte contre le tabagisme dans l’espace public dévie son activité pour s’occuper d’enfants ayant des parents violents, sinon au bout d’un long processus. Même si l’association connaît une forte croissance due à son activisme, à ses apports matériels et à l’augmentation de ses ressources humaines, il est peu probable que son organisation change fondamentalement ou que son image publique soit drastiquement modifiée. En d’autres termes, une structure est très difficilement réformable, et si elle l’est, ce sera généralement dans une mesure inconséquente.
Il est évidemment possible d’opérer une mutation : c’est par exemple le conseil constitutionnel qui s’octroie une compétence plus large après la mort de De Gaulle. Mais la majorité des réformes seront marginales, au sens où il s’agira de tendances minoritaires qui n’auront qu’une portée dérisoire face au fonctionnement habituel de la structure et à sa conservation, généralement défendue par la tête, et, par capillarité, jusqu’au bas de la hiérarchie. De plus, il est possible d’objecter que l’institution du conseil constitutionnel portait en elle la potentialité de ce coup de force, en tant qu’elle disposait déjà de prérogatives importantes et d’un seul contre-pouvoir : l’exécutif, avec qui elle entretient une porosité incestueuse.
Seules quelques situations pourraient permettre la réforme d’une structure et lui conférer un « second-souffle » :
un renouvellement sociologique majoritaire ou suffisamment prégnant pour opérer des changements significatifs : un nouvel esprit commun apparaît en conséquence de ce renouvellement générationnel, plus en phase avec l’actualité. Il est en revanche une bêtise de croire qu’un renouvellement sociologique expurge la totalité du substrat culturel propre à la structure : celui-ci survit inévitablement, au moins pour partie, à travers l’identité de la structure, ses expressions culturelles, son esthétique, etc. C’est aux caractéristiques historiques, habituelles, traditionnelles que les apports humains nouveaux vont se conformer de manière naturelle, c’est-à-dire sans les questionner. La structure doit effacer une partie de l’individualité pour la remplacer par la sienne propre afin de pouvoir agglomérer les individus. C’est ce que nous nommons « identité de la structure » : pour faire partie du groupe, il faut devenir « le même ». Bien sûr, plus la reproduction sociale sera forte, plus l’apport humain portera un esprit proche de la génération qu’il remplace. D’autre part, l’âge de la structure est une donnée déterminante : la jeunesse offre toujours une plus grande plasticité que ne permet pas un âge avancé. Ceci est vrai pour le corps et l’esprit d’une créature récemment issu du sein maternel comme pour une association ou un parti politique. Ainsi la jeunesse de la structure donne plus de loisirs aux changements de ses paramètres avant qu’ils soient verrouillés par l’habitude, comme la jeunesse de l’homme le rend plus prompt à se conformer à une identité ou à en changer ;
la modification de la situation qui a amené à l’existence de la structure. Par exemple, si une forme sociale, admettons les syndicats, se retrouve interdite, le groupe informel qui compose le syndicat dissout pourra se réunir à travers d’autres associations loi 1901 défendants des intérêts autres que de simples intérêts professionnels. De la même manière, le groupe n’a plus d’objet si sa fin a été atteinte : prenons l’exemple d’un groupe de riverains créé spécialement dans le but d’empêcher la construction d’une autoroute à proximité. Si l’acteur à l’initiative du projet renonce définitivement à celui-ci au regard d’éléments survenus ultérieurement à la décision de construire l’autoroute, l’association perdrait sa raison d’être. Cela dit, le même esprit et la même structure pourraient survivre, que ce soit pour lutter ponctuellement contre d’autres projets analogues ou pour un objet différent, comme l’organisation de réunions publiques, de fêtes communales, etc. Nous voyons dans ces deux derniers exemples que l’activité qui serait portée par l’association serait de nature différente, et donc susceptible de susciter des formes nouvelles de sociabilité autour de l’association (donc de séduire des sociologies nouvelles, différentes), ou de tendre vers des fins politiques autres. Notons qu’il serait absurde de poursuivre l’objet initial après sa disparition.
Pourtant, il est possible que les premiers membres de la structure, plus conservateurs, soient opposés au changement d’objet de la structure, même après que l’objet initial a disparu. Si le bon sens voudrait que ces éléments soient purgés, ce n’est pas nécessairement ce que commande la légitimité. L’image d’une structure est bien souvent, en interne comme depuis l’extérieur, associée à celle des membres les plus anciens, généralement les moins enclins à modifier l’objet, le fonctionnement ou l’image de la structure. Les purger pourrait ainsi être perçu, en interne comme de l’extérieur, comme un coup de force au sein de l’appareil : des personnes plus récemment arrivées dans la structure remplaçant d’autres qui y étaient de longue date, des idées originales prenant la place d’idées convenues, etc. Ainsi on comprend qu’il ne serait pas intéressant d’imposer une ligne nouvelle s’il manque au groupe la légitimité, qui sert de levier pour activer les individus compétents au sein du groupe.
En principe, l’inverse arrive : les groupes les plus vieux purgent les individus et les groupes les plus jeunes s’ils ne se conformes pas à la ligne du groupe historique qui a pu imposer durablement sa ligne. Ils purgent également « l’identité » différente, c’est-à-dire les sociologies autres que celles déjà présentes au sein du groupe. Cette inertie amène à une sécheresse dans l’actualisation stratégique, esthétique ou intellectuelle.
Le problème conservateur : un maquillage mortuaire
Le conservatisme naturel de la structure peut ainsi porter à ne même pas suivre des évolutions qui tombent sous le sens : pour une association écologique de se saisir de la question de nouvelles techniques plus efficaces que l’éolien dans la création d’énergie, et de continuer de faire la promotion de l’éolien comme si la découverte technique n’avait pas eu lieu, par exemple. Cela peut être vu comme une prévention raisonnable contre le risque d’entrisme, qui a effectivement comme but de modifier profondément une structure. Par exemple, des membres d’organisations de gauche radicale qui se mettraient massivement à participer à une structure apolitique pour lui donner une couleur politique et l’utiliser comme un satellite de la constellation des groupes de gauche radicale. C’est la raison pour laquelle un afflux important de nouveaux membres doit interroger la structure qui devras le cas échéant filtrer, sélectionner et choisir en fonction de ses besoins et de sa volonté.
De l’autre côté, la domination sans partage et ininterrompue de la ligne conservatrice signifie l’absence d’adaptation aux évolutions du contexte et/ou de l’objectif visé. Un corollaire à cette absence d’adaptation pourrait être une adaptation « suiviste », se conformant aux tendances très générales de la société afin de faire consensus, sans jamais innover, voire en étant franchement à la traîne. Par exemple, une société qui publierait des vidéos promotionnelles sur un réseau social récent sans essayer de reproduire ce qui marche sur ce réseau et en y publiant le même contenu que sur un réseau plus ancien. Le manque de spécialisation du contenu empêchera d’atteindre son nouveau public et les efforts financiers et humains déployés afin de passer le pas du nouveau réseau seront à perte. Si les cadres historiques, les responsables et autres se doivent d’incarner une certaine tempérance, ils vont très souvent au-delà de cette simple canalisation des esprits pour devenir fossoyeurs des initiatives. Le système démocratique produit de manière industrielle ce type de profils.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, ces conservateurs sont aux structures ce qu’en politique Abel Bonnard appelle les « modérés ». Ils sont trop mous, trop vieux, ont trop à perdre pour adopter une posture radicale nécessaire au volontarisme qui seul peut permettre la modification d’une structure et, le cas échéant, du système. Ce que nous décrivons ici n’est pas l’ambition d’une feuille morte, mais d’une feuille en décomposition. Est-ce à dire que la structure dont la ligne conservatrice a supplanté la tendance progressiste va mourir, privé de but, son système verrouillé et son esthétique dépassée ? Oui, « mais de mort lente » disait Brassens, et sa disparition va être repoussée parfois bien longtemps par ceux qui trouvent intéressant d’apprêter le cadavre de ses plus beaux habits, c’est à dire les rentiers de ces structures.
Pour survivre encore, la structure doit pouvoir modifier son fonctionnement pour permettre à la base de laisser libre cours à son initiative et à sa créativité. Un renouveau esthétique peut par exemple permettre d’infléchir l’image de la structure, de recruter dans des milieux nouveaux et in fine, aidé par les autres paramètres pourrait entraîner une modification générale de la ligne de la structure. Ce changement esthétique, s’il ne demande en théorie qu’un artiste ou une poignée d’individus avec une appétence artistique, peut néanmoins connaître une vive opposition de la part de la tête. La plupart du temps il n’arrivera pas, ou à contretemps en raison de l’inertie de la ligne conservatrice. Le conservateur lutte toujours contre le progrès avec un temps de retard. La psychologie peut également nous aider à comprendre ce conservatisme propre aux structures : la fonction est un masque social. En incarnant une responsabilité au sein d’une structure, nous sommes une part de l’autorité du mouvement et l’incarnons juste dans ses expressions les plus conservatrices et même caricaturales. S’il y a une psychologie des foules, il y a également une psychologie des chefs. Le responsable pourra couler avec sa structure, soit par fidélité pour elle, soit parce qu’il espère d’elle quelque avantage, quelque rente. Les structures sont des cimetières de chefs ratés, avec leurs cortèges d’intellectuels monomaniaques et leurs éléments honnêtes qui soutiennent activement la rente du mouvement et des rentiers du mouvement, et la fidélité des chefs rentre souvent en contradiction avec par incapacité (et l’impossibilité) de modifier le statu quo.
Précisons qu’il est également possible que la tête, ou un sous-groupe prégnant au sein du groupe, soit conservateur ou favorable à changement de la ligne pour des raisons extérieures à la politique interne : adhésion à une idéologie donnée, à la franc-maçonnerie, réception de fonds d’un pays étranger. Le schème reprend le même principe que celui de l’entrisme : un sous-groupe composant la structure pourrait impulser la déviation de la ligne ou conserver la ligne déjà existante sur fond d’un de ces motifs, ou pour des intérêts qui ne transparaissent pas officiellement, comme des avantages pécuniaires officieux ou une contrepartie en nature. Or il est rare que la corruption d’un sous-groupe permette à l’ensemble du groupe de sortir la tête de l’eau. Au contraire, il le compromet. Ainsi nous tenons à rappeler que toute inflexion à la ligne n’est évidemment pas bonne par essence et que le statu quo peut-être préférable à la mort de la structure ou de sa corruption, si tant est que la structure porte une utilité réelle (entendu, « pour le bien commun »).
Sur la rente : l’exemple du PCF
Sur la rente, il semble que le Parti communiste français soit un excellent exemple. D’abord, la base militante des MJCF est très loin non seulement de la ligne marxiste orthodoxe, mais également de la ligne actuelle du parti. Précisons pour l’exercice que la structure jeune est autonome financièrement et politiquement du PCF, mais qu’elle participe naturellement à l’effort de guerre du PCF en périodes électorales et pour les événements nationaux (organisation de la Fête de l’Huma, etc.). Reste que l’autonomie offerte à la structure jeune permet aux nouveaux apports générationnels de modifier continuellement la ligne et le fonctionnement, même si son impact est très modéré sur la structure politique et électorale.
Le PCF était originellement un parti de masse ouvrière, passé de longue date au RN, si bien qu’il lui reste un électorat d’environ 1% d’ouvriers aux diverses élections, le reste étant une extrême majorité du cadre du tertiaire. Ne répondant plus aux enjeux du siècle, le parti a opéré deux mouvements contradictoires motivés par deux tendances différentes.
La première est une tendance progressiste favorable à la majorité des enjeux postmodernes, un rapprochement économique avec les intérêts centristes, face à un mouvement patriotard de la ligne « rousseliste » qui sort ostensiblement le drapeau tricolore et se rattache à une tradition républicaine. Aucune des deux ne s’adresse aux ouvriers, ni à des sociologues nouvelles. La ligne postmoderniste est mieux assumée chez LFI, la ligne patriotique modérée est dégagée d’autres passions parasites chez certains souverainistes ou partis de droite. Le PCF est comme un insecte qui attends dans l’interstice étroit d’un mur d’attraper les miettes d’organismes plus petits.
Ainsi le but de la structure PCF n’est pas de répondre aux problèmes d’une partie définie de la population mais d’assurer cette rente toujours renouvelée de sa tête. Il n’y a alors pas forcément de volonté de croissance dans la structure : cette volonté ne serait portée que par les outsiders, des militants d’une sociologie nouvelle qui croient authentiquement à la cause défendue, et ne disposent d’aucune rente. La doctrine marxiste est rendue inopérante de longue date par les apories originelles de la dialectique matérialiste mais également par les évolutions dans les domaines monétaires, financiers et surtout dans ceux du travail. Trop vieille, la doctrine ne peut évoluer, car une doctrine est un cadre rigide qui ne peut évoluer. Dès lors, la seule perspective concrète qui s’offre au PCF est effectivement de continuer de disposer de sa rente, et au mieux de l’ouvrir à des éléments proches.
Notons que présent de longue date dans les ministères, dans les milieux de la culture et des médias, le PCF dispose d’un écosystème fourni que composent des myriades d’associations de sensibilité plus ou moins marxiste. Le soutien matériel et humain de ces structures-supports permet de faire croire que le PCF dispose de moyens importants, même s’ils n’en disposent pas en propre. Ainsi, même si le PCF a fait son temps et ne va plus exercer une influence déterminante sur la politique partisane, sur la pensée ou sur l’esthétique, il dispose toujours d’une rente, largement bâtie sur le bénévolat des militants (mandats, financements publics de l’Huma et des associations qui en sont plus ou moins satellitaires, dons des adhérents …).
Tromper la mort : les structures fantômes
Nous avons donc constaté qu’il existait des structures dont l’inertie permet de faire croire qu’elles sont encore en vie, alors même qu’elles cheminent lentement vers la mort. Celles-ci, nous les appelons « structures fantômes ». Elles sont pareilles à ce vieux chat familial qui économise ses forces vitales pendant le dernier quart de ses jours.
Les structures suivent le principe d’entropie, par exemple le politique se dissout dans la Ve République comme le sucre dans le café. Le pouvoir central a transféré certaines compétences de première importance à des structures supranationales, et en confie de nombreuses autres aux autorités administratives indépendantes et à bien d’autres agences.
Les tendances micro peuvent être trompeuses : certains évènements peuvent redonner une popularité éphémère au thème ou à l’objet poursuivi par la structure. Par exemple, le centenaire de l’anniversaire d’un auteur peut lui redonner un brillant fugace, et remettre à l’industrie quelques éditeurs et associations du souvenirs, des amis et occuper des journalistes et autres aficionados. Pourtant, il faudra peu de temps pour que tout ce petit monde s’en retourne à ses affaires quotidiennes, trop loin du pauvre écrivaillon boudé par ses contemporains, et qu’il retourne dans un oubli définitif.
Ainsi, l’État lui-même fait partie de ces monstres qui ne s’arrêtent pas de mourir, ces poulets sans tête auxquels les nerfs indiquent de tourner à gauche, ou à droite, ou en rond. Une perspective accélérationniste serait pour la décomposition des structures-fantômes en tant qu’elles freinent la recomposition. Le monde des apparences (celui où nous voyons encore des structures mortes) comporte plusieurs désavantages. Ici nous parlons d’attaquer l’État, mais pas nécessairement au sens de le renverser et/ou de le remplacer, mais aussi d’obtenir de lui un résultat. Imaginons par exemple une association qui souhaite faire reconnaître à l’État sa responsabilité dans la contamination de certains sols.
La structure-fantôme peut se débattre dans quelque sens qui lui paraîtra stratégiquement utile. Mais elle mobilisera des personnes et des ressources dans une direction sans que ses actions n’aient de conséquences, ce qui la rangera par défaut dans la catégorie des oppositions contrôlées. Oppositions contrôlées car inconséquentes au vu de la faiblesse de ses moyens et de sa portée. Admettons en effet qu’une structure se décide d’avoir pour objet de chasser les moulins : nous serons d’accord pour dire que cette association ne menace en rien le système. Ne disposant pas de la force suffisante pour s’attaquer au système, la structure-fantôme ne va s’attaquer qu’à des entités à sa mesure, c’est-à-dire d’autres structures-fantômes ou à peine en vie, ou encore le système mais à la manière d’un moustique attaquant un éléphant.
La faiblesse de l’État laisse un champ libre à qui veut le contrôler, en se faisant une place parmi les différents clans composant son administration et les représentants élus. Mais ces organismes parasitaires qui l’agitent encore par leur cupidité, lui donnent encore du rouge aux joues et de la chaleur au front : au lieu de l’achever, ils lui donnent un sursis. Les structures-fantômes ne se meuvent encore que parce que des intérêts les revêtent des apparences de la vie. Mais elle invite également à la mollesse : le système invite à la conservation des structures-fantômes puisqu’elles permettent toujours à leur tête un pouvoir dérisoire, une opposition sans importance, un quart d’heure de gloire et deux-cents balles.
Vive la mort
Qu’on m’excuse de dire ce que tout le monde sait, tant la biologie et l’écologie nous rappellent sans cesse ces mécanismes très simples. Le fait est que nous sommes entourés de structures fantômes, survivants de manière artificielle, comme autant d’étoiles déjà froides dont nous parviennent encore les rayons. L’activité d’une structure qui n’a pas évolué malgré la modification du contexte ou des caractéristiques de son objet est condamnée à fonctionner de manière dégradée, ses moyens s’étant nécessairement réduits par manque d’efficacité. C’est ainsi que des structures supposées faire vivre un héritage culturel n’agitent parfois qu’un folklore appauvri, ou ne proposent que l’équivalent d’une boutique souvenir de musée, jouant là-aussi sur une rente de ce qu’ils représentent. Ce passage de l’être à l’avoir correspond à une volonté d’immobilisation de ce capital, de quelque nature qu’il soit, devant l’intérêt ou devant l’impossibilité d’être cet héritage vivant.