Repenser le temps de travail : vers une semaine de 20 heures, pour une société organique et libérée


« La question sociale est aussi une question de temps. » Jérôme Baschet
La réduction du temps de travail a longtemps été un marqueur des combats ouvriers. Mais à l’ère de l’automatisation, de la crise écologique et de l’aliénation consumériste, elle redevient une revendication centrale pour une société plus juste, enracinée et organique. La proposition d’une semaine de 20 heures, loin d’être une utopie libérale ou une lubie progressiste, s’inscrit dans une perspective de transformation radicale de l’ordre social
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I. Critique du travail aliéné et de l’économie productiviste
Dans la tradition révolutionnaire non marxiste, le travail n’est pas glorifié pour lui-même, mais questionné dans sa nature et sa finalité. Georges Sorel, dans Réflexions sur la violence, oppose au travail aliéné du capitalisme industriel une éthique du travail artisan et du métier, enracinée dans la communauté organique. Pierre-Joseph Proudhon, quant à lui, critique la centralisation industrielle et prône l’association libre des producteurs, où le temps de travail serait choisi, mesuré et équilibré.
La glorification moderne du « plein emploi » à 40 heures repose sur une logique marchande d’exploitation maximale des forces vives, au détriment de la liberté, de la famille, de la vie communautaire. Le nationalisme, en tant que doctrine du juste ordre et de la souveraineté populaire intégrale, ne peut se satisfaire d’une société où les hommes sont privés de leur temps, de leur communauté, et de leur liberté intérieure.
La semaine de 20 heures ne vise donc pas une simple réforme salariale, mais une révolution anthropologique : replacer l’homme au centre, rompre avec l’hyperproductivisme et reconstruire une société fondée sur le travail choisi, la vie communautaire, la sobriété heureuse et l’engagement citoyen.
II. Une hypothèse validée empiriquement : les bienfaits du travail réduit
Les expériences récentes de réduction du temps de travail apportent une base empirique solide à cette intuition doctrinale.
Des chercheurs comme Anna Coote ou Juliet Schor théorisent depuis des années les bienfaits d’une semaine de 20 heures : réduction des émissions de CO2, relocalisation des activités, développement de la vie locale et de l’autonomie des individus. Loin du fantasme de l’oisiveté, cette réduction ouvre un espace pour l’engagement communautaire, familial, spirituel ou artistique — tout ce que le capitalisme moderne a sacrifié sur l’autel du temps-marchandise.
Au Royaume-Uni, la plus grande expérimentation mondiale de la semaine de 4 jours a été mené par le 4 Day Week Global, en lien avec des chercheurs de Cambridge, Oxford, Boston College. Expérimentation regroupant 61 entreprises, 2900 salariés. Les résultats de cette étude, après 6 mois, sont sans appels :
39 % des salariés disaient être moins stressés.
Les cas de burn-out ont diminué de 71 %.
Amélioration de la santé mentale et du sommeil.
Le chiffre d’affaires des entreprises a légèrement augmenté (+1,4 % en moyenne).
92 % des entreprises ont décidé de maintenir le modèle après l’expérimentation.
Le think tank britannique Autonomy a supervisé une expérimentation à grande échelle sur la semaine de 4 jours (32h). Dans 92 % des cas, les entreprises ont décidé de pérenniser la mesure. Les arrêts maladie ont baissé de 65 %, le burn-out de 71 %, et la productivité a été maintenue, voire améliorée.
Même certaines multinationales, comme Microsoft Japon, ont observé un gain de 40 % de productivité en adoptant la semaine de 4 jours.
Il n’existe pas d’expérimentation de masse documentée pour la semaine de 20 heures, mais certains chercheurs comme André Gorz, Juliet Schor ou encore Tim Jackson ont défendu ce modèle comme durable, soutenable écologiquement et nécessaire à une société post-croissance.
Des petites structures autogérées, coopératives ou militantes ont testé ce modèle avec succès en interne, mais sans données statistiques à grande échelle.
III. Une révolution organique du travail : vers une société enracinée
La semaine de 20 heures ne signifie pas la fin du travail, mais sa transformation : de l’aliénation à l’œuvre, de la subordination à l’engagement. Il ne s’agit pas de vivre dans l’oisiveté bourgeoise, mais de retrouver la plénitude de l’existence : cultiver un jardin, éduquer ses enfants, servir sa communauté, apprendre, créer.
Dans une société communautaire fondée sur le bien commun, le travail doit être partagé, digne, humain. Les penseurs nationaux-syndicalistes comme Ramiro Ledesma Ramos ou José Antonio Primo de Rivera ont souligné la nécessité d’une économie orientée vers la justice sociale et la solidarité nationale. Le modèle corporatiste qu’ils dessinent permettrait d’organiser une répartition équilibrée du temps de travail, au bénéfice de tous.
En France, des figures syndicalistes comme Georges Valois dans l’entre-deux-guerres avaient déjà théorisé une société fondée sur la solidarité organique, le refus du capitalisme abstrait et la valorisation de la communauté de travail. Réduire le temps de travail, c’est permettre à chacun de s’insérer pleinement dans la nation réelle, non comme rouage interchangeable, mais comme acteur libre et enraciné.
Bien sûr, il faut nuancer : tous les secteurs ne peuvent pas appliquer cette réduction uniformément. Certains métiers de soins, d’artisanat ou de défense nécessitent une présence continue. Il ne s’agit pas d’un dogme rigide, mais d’un horizon structurant.
Conclusion : pour une économie du temps libéré
La semaine de 20 heures n’est ni un rêve naïf ni une revendication syndicale déconnectée. Elle est la clé d’un nouvel ordre économique fondé sur la justice, la liberté, et l’enracinement. Dans un monde qui croule sous les injonctions du rendement, retrouver du temps, c’est retrouver de la dignité. C’est réapprendre à être père, frère, ami, militant, citoyen. C’est rendre à l’homme ce que le capitalisme lui a volé : sa souveraineté sur sa propre vie.
Quelques liens utiles :
: https://neweconomics.org/2010/02/21-hours
https://edition.cnn.com/2015/10/28/world/twenty-hour-work-week/index.html
https://neweconomics.org/2020/11/the-case-for-a-four-day-week
https://youtu.be/1IMYV31tZZ8?si=jm1OvP2ySMRH2JIW
https://www.architectural-review.com/essays/why-we-all-need-a-shorter-working-week